Alors qu’Altice France pensait avoir trouvé un compromis avec ses créanciers pour alléger sa dette colossale, une intervention du ministère public vient tout remettre en question. La restructuration de la dette Altice SFR est compromise par l’exclusion potentielle de SFR du plan de sauvegarde, ce qui pourrait faire capoter l’opération. Ce rebondissement ravive les inquiétudes autour de l’avenir du groupe… et de ses milliers de salariés.
Une restructuration fragile sous le feu judiciaire….
L’accord entre Patrick Drahi et les créanciers d’Altice France prévoyait d’alléger une dette abyssale de plus de 20 milliards d’euros, en annulant ou en rééchelonnant une partie des remboursements. Ce plan de sauvegarde, présenté devant le tribunal économique de Paris, devait acter un répit décisif pour la maison mère de SFR.
Mais le parquet a jeté un pavé dans la mare. Il recommande l’exclusion de trois des neuf sociétés concernées, dont SFR, du périmètre du plan. Une exclusion qui n’est pas anodine : elle pourrait faire échouer toute la restructuration. Les créanciers eux-mêmes l’ont reconnu, à l’audience : « sans SFR, pas d’accord viable ».
… mais aussi stratégique pour Drahi… et vitale pour SFR…
Enjeu central : la survie d’un modèle ultra-endetté. Patrick Drahi s’était engagé à restructurer sa dette tout en conservant le contrôle intégral de ses actifs, notamment SFR, bijou stratégique du groupe. Une validation du plan aurait permis à Altice d’effacer jusqu’à 8 milliards d’euros, tout en repoussant certaines échéances critiques.
Mais cette décision du parquet change la donne. Si le tribunal suit ses réquisitions le 4 août, SFR resterait grevée de dettes, rendant un éventuel rachat bien moins attractif. À court terme, cela pourrait figer toute tentative de vente, pourtant envisagée en coulisses. À long terme, cela pose la question de la viabilité du groupe dans sa forme actuelle.
Les salariés et les élus entre prudence et espoir.
Dans cette tempête financière, un acteur se fait entendre : les représentants des salariés de SFR. Pour eux, l’exclusion du plan pourrait, paradoxalement, protéger l’entreprise d’un démantèlement accéléré. Car en l’état, une revente brutale de SFR risquerait d’ouvrir la voie à des coupes sociales massives ou à une cession à la découpe.
Du côté des collectivités, l’inquiétude monte. SFR, acteur majeur du déploiement de la fibre et de la couverture mobile dans de nombreux territoires, reste stratégique. Une instabilité financière prolongée pourrait avoir un impact sur ses capacités d’investissement, au détriment des usagers.
Un précédent judiciaire et des enjeux de souveraineté numérique.
Cette affaire rappelle les tensions déjà rencontrées lors de la restructuration de Telecom Italia ou de l’examen du rachat de Vodafone Espagne par Zegona. Elle illustre les risques posés par la concentration de dettes dans les mains de quelques magnats des télécoms. Et relance le débat sur la gouvernance et la régulation de ces infrastructures critiques.
SFR au bord du précipice ou en sursis ?
Le 4 août pourrait marquer un tournant dans l’histoire du groupe Altice. Soit la restructuration est validée, offrant un sursis à Patrick Drahi. Soit la justice suit le parquet, avec un effet domino sur la solidité financière du groupe… et peut-être une relance des spéculations sur la cession de SFR.
Dans tous les cas, cette affaire montre à quel point le destin d’un opérateur télécom peut se retrouver suspendu à une décision judiciaire. Et pose une question fondamentale : les opérateurs historiques, acteurs clés de la souveraineté numérique française, doivent-ils rester entre les mains d’empires privés aussi instables ?