Le numérique européen repose encore massivement sur des infrastructures et services américains. Selon une étude du cabinet Asterès pour le Cigref, 80 % des dépenses européennes en logiciels et services cloud professionnels vont à des entreprises américaines, représentant un coût annuel de 264 milliards d’euros pour l’économie européenne. Ce chiffre symbolise non seulement une perte de valeur, mais aussi une dépendance stratégique critique, soulignant la dépendance numérique de l’Europe.
Un transfert massif de valeur vers les États-Unis
Ce chiffre se traduit en emplois, en croissance et en influence : près de deux millions d’emplois sont ainsi soutenus par les dépenses numériques européennes… mais aux États-Unis. Dans un contexte où la souveraineté numérique devient un enjeu central, cette situation est comparée par les analystes à la dépendance énergétique historique de l’Europe, montrant une interdépendance numérique en Europe.
Une fracture numérique difficile à combler
L’étude pointe un paradoxe : 78 % des décideurs européens reconnaissent l’importance de développer des solutions souveraines, mais seulement 32 % intègrent réellement cette priorité dans leur stratégie d’investissement. La domination des géants américains comme AWS, Microsoft Azure ou Google Cloud reste écrasante : 83 % de part de marché en Europe, dont 54 milliards pour la France, accentuant ainsi la dépendance numérique de l’Europe.
Trois scénarios pour une reconquête industrielle
L’étude imagine trois scénarios réalistes de réorientation progressive des achats vers des fournisseurs européens. Si 15 % du marché était récupéré d’ici 2035, cela représenterait :
– 463 000 emplois créés
– 75 milliards d’euros de chiffre d’affaires
– 37 milliards d’euros de valeur ajoutée
– 16 milliards d’euros de recettes fiscales
Cela reste modeste à l’échelle du PIB, mais démontre l’intérêt stratégique d’un réveil industriel coordonné face à la dépendance numérique européenne.
Un enjeu économique mais aussi géopolitique
L’étude souligne enfin un angle souvent oublié : la dépendance numérique confère un levier de pression politique. En cas de tensions commerciales, les États-Unis pourraient utiliser leur position dominante pour restreindre l’accès aux services cloud, poussant l’Europe à des compromis stratégiques défavorables. En 2025, cette prise de conscience s’inscrit dans une dynamique plus large d’autonomie technologique européenne visant à réduire la dépendance numérique en Europe.