Nouveau revers pour le géant de Cupertino. Dans une décision rendue le 1er mai 2025, la juge fédérale Yvonne Gonzalez Rogers a constaté qu’Apple n’avait pas respecté les injonctions prononcées en 2021 dans le cadre de son litige avec Epic Games, l’éditeur de Fortnite. L’enjeu : l’ouverture du système iOS à des boutiques d’applications concurrentes à l’App Store, une obligation que la firme aurait contournée avec des méthodes jugées anticoncurrentielles.
Une désobéissance judiciaire explicite
Retour en arrière. En 2021, la justice américaine avait tranché : Apple ne pouvait plus contraindre les développeurs à utiliser exclusivement l’App Store ni son système de paiement intégré, accusé de ponctionner des commissions de 15 à 30 % sur chaque transaction. Cette décision faisait suite à une plainte d’Epic Games qui dénonçait un abus de position dominante.
Trois ans plus tard, la juge Gonzalez Rogers dénonce une manœuvre de contournement : Apple a mis en place une nouvelle commission de 27 % pour les paiements hors App Store, accompagnée de messages dissuasifs envers les utilisateurs, et de restrictions techniques pénalisant les éditeurs tentant d’orienter leurs clients vers des alternatives. La juge accuse également Apple d’avoir fourni des témoignages trompeurs sous serment et de n’avoir suivi aucune des recommandations internes allant dans le sens de la conformité. Résultat : la firme californienne risque désormais des poursuites pénales fédérales.
Une jurisprudence lourde de conséquences
Le jugement ordonne désormais à Apple :
- De ne prélever aucune commission sur les transactions réalisées hors App Store.
- De cesser d’envoyer des messages dissuasifs aux utilisateurs passant par des stores tiers.
- De mettre en œuvre immédiatement les directives initiales de 2021, restées lettre morte.
Cette décision pourrait bien marquer un tournant historique pour le modèle économique d’iOS, jusqu’ici verrouillé au profit d’une distribution centralisée et hyper-rentable. Pour Epic Games, c’est une victoire majeure, qualifiée de fin de la taxe Apple par son CEO Tim Sweeney sur X (ex-Twitter).
Quelles implications pour l’écosystème mobile ?
Si Apple entend faire appel, l’affaire souligne avant toutes choses la montée en puissance des exigences d’ouverture du numérique, aux États-Unis comme en Europe. Le DMA (Digital Markets Act), en vigueur depuis 2024, impose déjà à Apple d’ouvrir iOS à d’autres app stores sur le sol européen. Cette nouvelle condamnation pourrait accélérer la convergence des régulations internationales vers une refonte du contrôle des plateformes.
Pour les technophiles et les utilisateurs d’iPhone, ce jugement devrait pourtant changer profondément l’expérience d’iOS et notamment :
Une diversification des canaux de téléchargement
Jusqu’à présent, les utilisateurs d’iPhone étaient en effet contraints de passer exclusivement par l’App Store pour installer des applications. Avec l’ouverture imposée par la justice américaine (et renforcée par le Digital Markets Act en Europe), il devient possible d’imaginer un écosystème iOS plus proche d’Android, où l’utilisateur pourrait choisir d’installer des applications via des boutiques alternatives (Epic Games Store, Setapp, etc.). Cela aura forcément pour conséquence une certaine liberté de choix, tout en stimulant l’innovation logicielle, aujourd’hui freinée par les contraintes techniques et économiques imposées par Apple.
Une baisse potentielle des prix des abonnements et achats in-app
L’un des points les plus contestés par les éditeurs concerne la commission prélevée par Apple, de 15 à 30 % sur chaque transaction in-app. En autorisant d’autres solutions de paiement, la nouvelle régulation crée une pression concurrentielle. Les développeurs auront désormais la possibilité de proposer des tarifs plus compétitifs hors App Store, et potentiellement répercuter les économies sur l’utilisateur final. À terme, cela fera baisser le prix de certains abonnements ou services, notamment dans la presse, le streaming ou les jeux mobiles.
Une meilleure interopérabilité des moyens de paiement
Aujourd’hui, de nombreux services (Spotify, Netflix, ou des journaux comme Le Monde) refusent d’activer l’achat in-app sur iOS pour éviter les commissions d’Apple, obligeant les utilisateurs à passer par un navigateur ou un paiement externe peu fluide. En ouvrant iOS à d’autres systèmes de paiement (Stripe, PayPal, CB…), les éditeurs obtiendront une fluidification des parcours d’achat, tout en redonnant à l’utilisateur le choix de son moyen de paiement. Ce qui améliorera grandement l’expérience utilisateur, réduira les frictions, et pourra aussi sécuriser davantage les transactions grâce à des systèmes renforcés de double authentification.
Mais cela pose aussi des questions : quid de la sécurité des terminaux ? des garanties utilisateur en cas de tiers malveillant ? Apple, qui a toujours brandi l’argument de la sécurité comme raison d’un écosystème fermé, va devoir revoir sa copie.
Source Mashable