Le numérique est devenu un levier incontournable d’intégration sociale et professionnelle, mais les inégalités d’accès aux compétences digitales restent criantes. Face à ce constat, la Fondation Free s’associe à l’association Konexio pour lancer DigiFree, un programme ambitieux destiné à former et accompagner 80 jeunes de Seine-Saint-Denis vers l’emploi et l’autonomie numérique.
Cette initiative illustre une tendance de fond dans laquelle les entreprises du numérique cherchent à se positionner comme des acteurs de la formation et de l’inclusion, en complément des politiques publiques. Mais au-delà de l’intention louable, quelle est la portée réelle de DigiFree et quels difficultés reste-t-il à relever ?
DigiFree, un programme conçu pour répondre aux besoins du marché
DigiFree ne se limite pas à une simple initiation au numérique. Le programme se veut global et pragmatique, avec un accompagnement sur un an comprenant :
20 heures de formation numérique pour acquérir les bases essentielles (bureautique, navigation en ligne, cybersécurité).
Des ateliers dédiés à l’intelligence artificielle pour sensibiliser aux outils d’avenir.
Des sessions de coaching personnalisées avec des collaborateurs de Free, axées sur la rédaction de CV et la préparation aux entretiens.
Cette approche hybride combine savoir-faire technique et développement personnel, en misant sur l’engagement des salariés de Free, qui interviennent en tant que mentors et formateurs.
En favorisant l’immersion en entreprise et la transmission des codes du monde du travail, DigiFree entend renforcer l’employabilité de jeunes souvent éloignés des circuits classiques de recrutement.
Pourquoi une telle initiative ? Le numérique, entre opportunités et fractures
Le programme DigiFree s’inscrit dans un contexte où l’inclusion numérique est devenue un enjeu stratégique. En France, près de 13 millions de personnes sont en situation d’illectronisme, c’est-à-dire qu’elles n’ont pas les compétences numériques de base. Or, 90% des emplois requièrent désormais une maîtrise du digital.
Cette fracture est particulièrement marquée en Seine-Saint-Denis, un département où le taux de chômage des jeunes dépasse les 30% et où les opportunités de formation restent limitées.
En intégrant la dimension IA au programme, Free et Konexio adoptent une approche tournée vers l’avenir. L’intelligence artificielle modifie profondément le marché du travail, et il devient crucial d’accompagner les jeunes dans l’appropriation de ces nouveaux outils, sous peine de creuser encore davantage les inégalités.
DigiFree répond donc à une double nécessité, fournir des compétences numériques essentielles pour faciliter l’accès à l’emploi, mais aussi préparer les jeunes aux mutations du marché du travail, en les initiant aux nouvelles technologies comme l’IA.
Une immersion dans le monde de l’entreprise : un atout décisif
L’un des points forts du programme réside dans l’immersion professionnelle proposée aux participants. Dès l’inauguration, une trentaine d’apprenants ont pu découvrir le siège du groupe Iliad, assister à des présentations métiers et échanger avec les collaborateurs de Free.
Cette approche est essentielle car l’insertion ne repose pas uniquement sur les compétences techniques, mais aussi sur la compréhension des codes de l’entreprise. Les jeunes issus de quartiers populaires peuvent souvent manquer de réseaux professionnels, ce qui freine leur accès aux opportunités.
Le coaching CV et les simulations d’entretien menés par les équipes RH de Free visent à combler ce déficit, en leur offrant des outils concrets et des conseils personnalisés pour maximiser leurs chances sur le marché du travail.
Quel impact réel pour DigiFree ?
Si DigiFree présente de solides arguments, la question de son impact réel reste à suivre. Plusieurs objectifs devront être atteints pour garantir son efficacité sur le long terme.
Acquérir des compétences numériques, c’est bien. Mais comment s’assurer que les jeunes trouvent réellement un emploi ou une formation qualifiante après DigiFree ? La mise en place d’un accompagnement renforcé après la formation devra être un atout.
Actuellement, DigiFree est annoncé pour 80 jeunes sur un an. Pour un impact significatif, il serait pertinent d’élargir l’initiative à plus de bénéficiaires et de la rendre permanente.
Autre point déterminant, le numérique évolue rapidement. Il est essentiel que les contenus pédagogiques soient régulièrement mis à jour pour coller aux besoins des employeurs et aux tendances du marché du travail.
Pour finir, DigiFree gagnerait à s’intégrer à des parcours plus larges, incluant des formations qualifiantes ou des passerelles vers des certifications reconnues (comme le Pix pour les compétences numériques).
DigiFree : un pas dans la bonne direction, mais un défi à relever sur le long terme
Avec DigiFree, Free et Konexio s’attaquent à un problème majeur : l’inclusion numérique et professionnelle des jeunes issus de quartiers prioritaires. Le programme a le mérite de mêler apprentissage, coaching et immersion en entreprise, tout en intégrant une sensibilisation aux enjeux de l’IA.
Mais comme toute initiative de ce type, son succès dépendra de sa continuité et de son suivi. Free et Konexio ont posé les bases d’un projet prometteur, reste à voir s’il s’inscrira dans la durée et s’adaptera aux défis du marché du travail numérique.
L’initiative est là, les ambitions aussi. Il reste désormais à transformer cet essai en un véritable tremplin vers l’emploi pour les jeunes de Seine-Saint-Denis.