L’édition 2025 du rapport sur l’état d’Internet en France, publiée par l’Arcep, confirme l’avancement technique du réseau français : 94 % des Français sont internautes, le trafic entrant progresse, la transition vers IPv6 s’accélère, et la neutralité du net tient bon. Mais derrière ces constats rassurants, l’Autorité attire aussi l’attention sur de nouveaux enjeux : impact de l’IA générative, durabilité du numérique, régulation du cloud et gouvernance des données.
L’état des lieux : un réseau performatif, mais sous tension.
Interconnexions : le trafic progresse, mais ralentit
En 2024, le trafic entrant des FAI français a atteint 50,8 Tbit/s, en hausse de 9,2 %. Cette croissance reste modeste par rapport aux années post-Covid (+30 % en 2021). 5 acteurs dominent toujours les flux (Netflix, Akamai, Google, Meta, Amazon), mais leur part recule légèrement (47 % contre 53 % en 2023), signe d’une plus grande diversification.


IPv6 : la France passe en tête mondiale
En juin 2025, la France est devenue le pays le plus avancé en matière d’adoption d’IPv6. 87 % des clients fixes et 70 % des clients mobiles utilisent ce protocole, avec une migration complète attendue d’ici 2027 pour le grand public. L’Arcep alerte cependant sur le retard des réseaux entreprises et hébergeurs.
Neutralité du net : un modèle toujours solide
Le rapport célèbre les 10 ans du règlement européen sur l’Internet ouvert. L’Arcep et ses homologues du BEREC ont notamment examiné la compatibilité des offres de « slicing » (qualité de service différenciée) avec la neutralité du net. Verdict : pas d’incompatibilité, mais une vigilance renforcée.
Au-delà du réseau : l’Internet comme bien commun sous pression.
IA générative : nouvelle interface, nouveaux risques
L’Arcep ouvre un chantier prospectif sur les IA génératives et leur impact sur l’accès à l’information. Ces outils, en structurant les résultats affichés, peuvent remettre en cause la pluralité des sources et la capacité des innovateurs à exister. Un rapport est attendu d’ici fin 2025, réalisé en lien avec le PEREN et la société civile.
Cloud et données : vers une régulation renforcée
Avec la loi SREN (mai 2024), l’Arcep devient régulateur des prestataires de services d’intermédiation de données. Elle définit également un cadre tarifaire et technique pour les services cloud, en anticipation du Data Act. L’objectif : favoriser la compétitivité et l’interopérabilité.
Numérique soutenable : agir maintenant
L’impact environnemental du numérique progresse. Les centres de données et services audiovisuels sont pointés. L’Arcep met à disposition un référentiel d’écoconception en 78 fiches pratiques, et a lancé un forum national pour partager les bonnes pratiques avec les acteurs du secteur.
Une vision à 360° de la souveraineté numérique
Ce rapport montre une Arcep proactive, stratégique, et pas seulement technique. Elle anticipe les mutations de l’internet, au croisement de l’infrastructure, des contenus, des données et des usages. Face aux GAFAM, elle tente de construire un modèle européen d’internet ouvert, durable, et souverain.
Le véritable enjeu à l’horizon 2030 sera de concilier innovation, liberté d’accès, respect de l’environnement et régulation efficace. Les choix faits aujourd’hui sur IPv6, le cloud ou l’IA générative en dessineront les contours.