Mulve : gare au marketing anti-Hadopi

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A bien des égards, la loi Hadopi est impopulaire auprès des internautes. Le mouvement anti-Hadopi permet de se renseigner sur les dangers de la loi, sur ses effets et sur les façons de se protéger contre les sanctions. Mais le phénomène a pris une telle ampleur que se déclarer « anti-Hadopi » devient parfois une vraie méthode marketing pour communicants en manque de buzz…

Tout récemment, plusieurs sites ont fait les gros titres autour de Mulve, un logiciel de téléchargement illégal de musique. La nouvelle se répand comme une traînée de poudre sur de nombreux sites : « pied de nez à Hadopi », « anti-Hadopi », « un Napster puissance 10 »… les qualificatifs ne manquent pas. A l’exception d’une poignée de sites comme Electron Libre, la Toile entière tombe dans le panneau…

Les morceaux sont puisés dans une prétendue « base de données » de plusieurs millions de fichiers, dixit les auteurs du logiciel. S’appuyant sur le téléchargement direct, le soft ne repose donc pas sur un réseau P2P surveillé par Hadopi et permet, en outre, des vitesses de téléchargement impressionnantes.

Une simple petite vérification aurait pourtant permis de s’apercevoir que le logiciel ne faisait que renvoyer les résultats d’un moteur de recherche audio russe, Vkontakte.ru. Le logiciel ne se contente que de servir d’interface alternative pour la recherche et le téléchargement. Dès lors, son intérêt est plus que limité. Mais ce n’est pas tout.

En creusant quelque peu, on s’aperçoit qu’un logiciel proposant exactement les mêmes fonctionnalités que Mulve existe déjà : sobrement intitulé Pirateapp, il est disponible en open source (MIT License) sur Google Code depuis début septembre ; Mulve s’appuie vraisemblablement dessus sans le citer. Les créateurs de Mulve ont cependant cru bon de fermer les sources de leur logiciel, de cacher l’existence de Pirateapp et de Vkontakte.ru, et de rajouter des publicités au soft. Avec un buzz soigneusement orchestré, leur logiciel a pourtant rencontré le succès grâce au « marketing anti-Hadopi » en France.

On comprend difficilement en quoi un simple logiciel de téléchargement direct (comme il en existe déjà des centaines, ainsi que des annuaires de liens ou des forums consacrés) serait une solution anti-Hadopi ; il suffit que le site en question soit fermé, bloqué, saisi, etc. pour que la solution entière s’écroule, et accessoirement que les historiques de téléchargement tombent entre de mauvaises mains. C’est pour cela que les réseaux P2P sont nés, et qu’ils dépendent de moins en moins de serveurs centralisés pour fonctionner…

Mulve n’est pas une avancée face à Hadopi ; c’est un véritable retour en arrière. Il convient au contraire de développer des solutions totalement décentralisées et chiffrées, indétectables et encore trop peu répandues, à l’instar de Freenet.

En se précipitant sur un logiciel sorti de nulle part sans en comprendre le fonctionnement, on fait confiance à un tiers inconnu… et le risque encouru est tout aussi important que sur n’importe quel réseau P2P. Qu’on se le tienne pour dit…

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Rédactrice principale sur Freenews de 2009 à 2020. Il paraît que des personnes demandent de mes nouvelles depuis.

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