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DAZN : la fin de la Ligue 1 relance le débat sur la résiliation d’abonnement

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La plateforme DAZN ne diffusera plus la Ligue 1 à partir de la saison prochaine, mais refuse pour l’instant de résilier les abonnements annuels de ses utilisateurs les plus engagés. Un bras de fer silencieux s’installe entre la promesse initiale faite aux fans et la réalité contractuelle, révélant un vide juridique préoccupant sur les offres de streaming sportif. L’affaire pose une question capitale : à quoi s’engage réellement une plateforme lorsqu’elle vend une promesse de contenu ?

Une promesse envolée : des abonnés engagés sans Ligue 1

Alors que DAZN s’était positionné comme diffuseur majeur de la Ligue 1 jusqu’en 2029, des milliers d’abonnés avaient souscrit un engagement annuel, souvent en fin d’année 2023 ou début 2024, à un tarif préférentiel. L’annonce brutale de la fin de l’accord entre DAZN et la LFP — bien avant son échéance théorique — a pris ces clients au dépourvu.

Depuis le 2 mai, date de la rupture officielle, la plateforme a cessé de diffuser 8 matchs sur 9 de chaque journée. Pourtant, DAZN refuse toujours de libérer les abonnés de leur contrat, invoquant des discussions en cours avec LFP Media autour d’un possible nouveau partenariat. Elle continue de proposer du contenu alternatif — matches de barrages, kick-boxing, Coupe du Monde des clubs — tout en suspendant toute réponse claire quant à la résiliation.

Certaines voix s’élèvent sur les réseaux sociaux, évoquant une « rupture abusive » et un sentiment de trahison. Des abonnés racontent avoir choisi l’offre DAZN uniquement pour la Ligue 1, pensant bénéficier d’une stabilité jusqu’à l’été 2026. La disparition du produit principal transforme ces abonnements en coquilles vides pour de nombreux utilisateurs.

Une zone grise réglementaire pour les offres sportives OTT

La situation met en lumière une faille juridique : rien dans les conditions générales de vente de DAZN ne prévoit explicitement la rupture du contrat en cas de perte du contenu phare. Le modèle des plateformes OTT, centré sur l’abonnement à des contenus spécifiques, se confronte ici à ses propres limites. Peut-on continuer à facturer un abonnement si le produit principal a disparu ? L’affaire rappelle la crise Mediapro/Telefoot de 2020, où les abonnés s’étaient retrouvés dans une situation similaire.

La direction de DAZN avance vouloir continuer à discuter avec la LFP, mais sans garantie. Si la plateforme ne parvient pas à reprendre des droits, elle pourrait devoir faire face à une vague de litiges, voire à une enquête de la DGCCRF. En filigrane, c’est la confiance des abonnés dans les offres dites « sportives à la carte » qui vacille.

L’affaire soulève aussi des questions de transparence : les abonnés de DAZN via des partenaires comme Canal+, Prime Video ou Orange ne sont pas concernés de la même façon, car la plateforme ne gère pas directement leurs données contractuelles. Cela crée une inégalité de traitement entre abonnés directs et indirects.

Que disent les régulateurs ? Et que peuvent faire les abonnés ?

Actuellement, aucune instance européenne ni française n’impose aux plateformes une obligation explicite de rembourser ou de résilier en cas de disparition d’un contenu spécifique, sauf clauses contraires. La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) pourrait cependant être saisie si les engagements commerciaux initiaux sont jugés mensongers.

Des associations de consommateurs comme UFC-Que Choisir pourraient déposer des recours collectifs, ou au minimum proposer des recours individuels. Plusieurs juristes évoquent la possibilité pour les abonnés d’arguer d’un « défaut de contrepartie » en cas d’absence du contenu majeur lié à l’abonnement.

En parallèle, les régulateurs européens, à l’image de l’ERGA (European Regulators Group for Audiovisual Media Services), pourraient s’emparer du sujet pour bâtir un encadrement plus robuste. Une réflexion sur l’encadrement des offres sportives premium, parfois vendues comme des bouquets garantis mais très instables, semble inévitable.

Une rupture sportive qui pourrait faire jurisprudence

L’affaire DAZN illustre les risques d’un modèle centré sur un contenu unique et expose un déséquilibre croissant entre opérateurs de streaming et abonnés. Si aucune solution amiable n’émerge rapidement, la question de la résiliation deviendra un sujet politique et juridique bien plus large, avec des impacts potentiels sur toutes les plateformes OTT.

En France, l’ARCOM pourrait également être appelée à se prononcer sur la nature des engagements commerciaux liés à des contenus sportifs, dans un contexte où la Ligue 1 change fréquemment de diffuseur. Le cas DAZN pourrait servir de catalyseur pour l’écriture d’une « charte de la transparence contractuelle » entre les plateformes sportives et les consommateurs.

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